L’HISTOIRE ET LA SCIENCE
Le très bel espace du Musée d’art et d’histoire du Judaïsme offre la première rétrospective du photographe américain, déclinée sur plusieurs niveaux, parallèlement à une existence complexe, infléchie par l’Histoire et guidée par la volonté farouche d’accomplir une œuvre scientifique. Perpétuel émigré, quittant Moscou pour Berlin, Berlin pour Paris, embarquant à Lisbonne pour s’établir enfin à New York, Roman Vishniac a produit une œuvre documentaire considérable au profit des organisations allemandes et américaines d’entraide aux communautés juives d’Europe centrale, avant et pendant les persécutions nazies. Reporter talentueux qui parvenait à concilier information et esthétique, Vishniac a développé sa production avec l’installation de son studio à New York en 1941, où il a su se construire une réputation de portraitiste couru par tout ce qui brillait sur la scène culturelle de Manhattan. L’après-guerre devait revoir le photographe dans Berlin en ruines, davantage inspiré par la détresse des civils que par la vision d’apocalypse d’une capitale déchue. A la fin de sa vie, son travail de témoin accompli, Roman Vishniac s’est consacré pleinement à la photomicrographie dont, en autodidacte, il s’était fait le spécialiste. Par un maître à découvrir, une magnifique évocation des temps forts du 20e siècle.
Hervé Le Goff
Roman Vishniac. De Berlin à New York, 1920-1975. Muse d’art et d’histoire du Judaïsme, Hôtel de Saint-Aignan 71, rue du Temple Paris 3e. Jusqu’au 25 janvier 2015.